---- Créateur des Cieux et de la Terre Plate
La réminiscence de la création de l’univers est un thème surgissant de temps à autre à travers les sourates du Coran, aussi bien la splendeur de l’œuvre divine que ses bienfaits sont maintes fois encensés. Dieu est le grand architecte « le créateur des cieux et de la terre » (badî’ ou fâtir as-samâwât wa-l-ard) à partir du néant, à lui « seul appartient la royauté des cieux et de la terre et de ce qui se trouve entre les deux » (5.18). Au commencement tout n’était qu’un agglomérat de matière que Dieu morcela (31.30) dans le dessein de concevoir le firmament et les sept terres (65.12). Il réalisa en premier lieu la planète bleue et les espèces animales et végétales puis il orienta « Sa volonté vers le ciel » (2.29) « qui était alors fumée » et « décréta d'en faire sept cieux » (41.11-12). La sourate al-Nâzi’ât dénote toutefois une chronologie contraire : l’éternel charpentier édifia d’abord la voûte céleste puis il façonna la terre et ses ressources (79.27-33). Les versets déclarant que le Seigneur des mondes ancra « des montagnes fermes dans la terre, afin qu'elle ne s'ébranle pas » (21.31, 16.15 et 31.10), supposent que la planète soit une étendue plate fixée à une structure stabilisatrice par des montagnes jouant le rôle de « clous ».
Les traductions du Coran ne reflètent pas toujours fidèlement le texte arabe qui est clair et précis au sujet de la forme de la terre. Dans la langue arabe les mots dérivent d’une racine bilitère, trilitère ou quadrilitère renvoyant à une même idée. La « racine renvoie en principe à une même notion : par exemple, la racine كتب (k.t.b) renvoie à la notion écrire. La racine est habillée de différente façon avec des voyelles, des ajouts de lettres, etc. pour former des mots suivants des modèles précis appelés schèmes. Ces schèmes sont nominaux ou verbaux. Voici des mots tirés de la même racine كتب :
مكتوب (écrit) – كاتب (écrivain) – كَتَبَ (il a écrit) – مكاتبة (correspondance) – اكتتاب (inscription, engagement) »1.
Non influencés par la science moderne, les théologiens musulmans d’autrefois confessaient que la terre était plate en corroborant leur raisonnement par des versets du Coran. À notre époque, nonobstant les clichés satellitaires et les observations depuis les navettes spatiales, d’éminentes personnalités musulmanes pensent encore que la planète est un disque. Le grand Moufti d’Arabie saoudite ‘Abd al-Aziz Ibn Baz (m. 1999) écrivit dans la première édition de son livre Al-Adilla an-Naqliyya wa-l-Hissiyya `ala Imkân as-Sou’oud ila al-Kawâkib wa-’ala Jarayân ach-Chams wa-l-Qamar wa-Soukoun al-Ard parue en 1976 que « l’opinion selon laquelle le soleil est fixe et que la terre est ronde est un avis abominable et détestable, celui qui dit que la terre tourne et qui nie l’existence de la course du soleil est un apostat et s’est égaré. Il est invité à se repentir, sinon le mécréant apostat est tué et ses biens sont reversés dans la trésorerie des musulmans »2. Les éditions subséquentes de l’ouvrage furent révisées et le cheikh saoudien contesta avoir tenu ces propos. Son changement d’attitude résulta des pressions qu’il subît de la part de son entourage. Cependant, il était déjà trop tard pour faire machine arrière. Le philosophe syrien Sadik Jalal al-‘Azm fit savoir dans une interview accordée à un quotidien qatari :
Dans son livre publié en 1985, Ibn Baz a complètement rejeté l'idée que la terre est ronde. Il a évoqué la question sur la base que la terre est plate. Il a complètement rejeté l'idée que la terre tourne en orbite autour du soleil. Je possède le livre et vous pouvez vérifier ce que je dis. Et oui, la terre ne tourne pas autour du soleil, c'est plutôt le soleil qui fait le tour de la terre. Il nous fait revenir à l'astronomie ancienne, à la période pré copernicienne. Bien sûr, dans ce livre Ibn Baz déclare que tous ceux qui disent que la terre est ronde et tourne en orbite autour du soleil sont des apostats. En tout état de cause, il est libre de penser ce qu'il veut. Mais la grande catastrophe c’est que pas un seul des religieux ou des institutions universitaires dans le monde musulman, de l’Orient à l’Occident, de Al-Azhar à Al-Zaytouna, de Al-Qaradhawi à Al-Tourabi au cheikh Ahmad Kaftaro, et des départements d’étude de la charia, pas un seul n’a osé dire à Ibn Baz à quel non-sens il s’accroche au nom de la religion islamique.3
1 Grammaire active de l’arabe littéral, par Michel Neyreneuf et Ghalib Al-Hakkak, p.20, Éditions le livre de poche, 2008
2 Cité dans Wahm al-I’jâz al-‘Ilmi, Khaled Montaser, p.79, Dâr al-‘In lil-Nacher, 2005
3 A comprehensive interview with syrian philosopher Sadik Jalal al-‘Azm, Al-Raya (Qatar), January 12, 2008, www.memri.org
( A SUIVRE )
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