Etats-Unis. "Torture" d'un condamné à mort : le débat rouvert
1 mai 2014 à 08h37 / AFP /
La longue agonie - la "torture" - d'un condamné à mort, mardi soir, dans l'Oklahoma, illustre la grande confusion qui règne dans plusieurs Etats américains, qui, en panne de barbituriques pour procéder à leurs exécutions, bataillent pour trouver une solution de repli. Certains envisagent - ou l'ont déjà fait - un retour à la chaise électrique ou au peloton d'exécution.
Quelques minutes après le début de l'injection d'un nouveau cocktail létal, qui n'avait jamais été testé aux Etats-Unis, "Clayton Lockett a été pris de convulsions, soulevant la tête et la poitrine de la table d'exécution, tremblant, agitant la tête et grognant des mots inaudibles". Voilà ce qu'a raconté un journaliste local, dont les propos ont été partiellement confirmés par les autorités pénitentiaires.
La plus grande confusion
Le rideau a alors été fermé, empêchant les témoins d'en voir davantage. Peu après, dans une grande confusion, Robert Patton, le directeur des prisons, a invoqué "l'échec de l'intraveineuse" et ordonné l'arrêt de l'exécution. Mais les trois produits ayant déjà été injectés, Clayton Lockett a succombé à "une crise cardiaque foudroyante" exactement 43 minutes après le début de l'injection létale, contre une dizaine de minutes habituellement.
Dans la foulée, Robert Patton a décrété le report de 14 jours de l'exécution suivante programmée deux heures plus tard, celle de Charles Warner.
"Torturé à mort"
La gouverneure de l'Oklahoma a ordonné "un réexamen complet de la procédure d'exécution" pour déterminer ce qui s'est passé. Mais, estimant que "Clayton Lockett a été torturé à mort", l'avocate de Charles Warner a, de son côté, réclamé "une enquête indépendante", une autopsie, ainsi que la levée du secret "sur les médicaments, y compris leur degré de pureté, leur efficacité, leur origine et les résultats de tous les tests".
Depuis cinq à sept ans, plusieurs Etats américains ont choisi d'abolir la peine capitale, notamment à cause "de l'incroyable difficulté à conduire les injections létales de manière transparente et conforme au 8e Amendement", interdisant toute "punition cruelle et inhabituelle".
Des difficultés à trouver des barbituriques
En raison du refus de fabricants européens de fournir l'anesthésiant le plus courant (pentobarbital) pour des exécutions humaines, les 32 Etats pratiquant encore la peine capitale "ont de très grandes difficultés à trouver des barbituriques et s'échinent à chercher" une source d'approvisionnement, explique Deborah Denno, professeur de droit.
Des médicaments pas homologués
Ils changent de procédure ou se tournent vers les très controversés préparateurs en pharmacie, dont les médicaments ne sont pas homologués par les autorités fédérales. "Cela force les Etats qui utilisent l'injection létale à improviser, et cette improvisation crée cette cacophonie dans les exécutions", observe Robert Blecker, professeur à l'Ecole de droit de New York.
Quelles solutions alternatives ?
Cet ardent défenseur de la peine de mort se félicite que cette controverse permette de rouvrir le débat sur des méthodes alternatives à l'injection létale. Chaise électrique, pendaison... "Je suis favorable au peloton d'exécution qui reconnaît qu'il s'agit d'une punition et ne prétend pas être de la médecine", dit le Pr Blecker, lui qui s'est toujours opposé, pour cette raison, à la généralisation de l'injection létale.
Le Tennessee a déjà approuvé le retour à la chaise électrique. La Géorgie et la Virginie l'envisagent, tandis que le Missouri et le Wyoming parlent de renouer avec le peloton d'exécution.