Au moins trois morts dans une tuerie au Musée juif de Bruxelles
Le Monde.fr avec AFP | 24.05.2014 à 17h10 • Mis à jour le 24.05.2014 à 20h28
Au moins trois personnes ont été tuées et une autre gravement blessée lors d'une tuerie au Musée juif de Belgique, à Bruxelles. L'attaque a eu lieu samedi 24 mai à 15 h 50, rue des Minimes au Sablon, un quartier chic du centre de la capitale belge, a indiqué le porte-parole des pompiers de Bruxelles, Pierre Meys. Douze personnes gravement choquées ont été prises en charge par les services d'assistance. Le quartier a été bouclé et la sécurité a été renforcée aux alentours de tous les lieux liés à la communauté juive de Belgique.
« Les victimes sont deux hommes et une femme, ainsi qu'un homme grièvement blessé qui a été évacué », a indiqué le bourgmestre de Bruxelles, Yvan Mayeur, à l'antenne de la RTBF. Il n'était pas en mesure de préciser s'il s'agissait de visiteurs ou de membres du personnel du musée. Les identifications sont toujours en cours.
Le quartier est très fréquenté par les touristes en raison notamment de la présence de nombreux antiquaires. De nombreux Bruxellois se trouvaient par ailleurs dans les rues avoisinantes pour profiter des concerts gratuits donnés à l'occasion du Brussels Jazz Marathon. L'attaque survient à la veille d'élections fédérales, régionales et européennes en Belgique.
« La police de Bruxelles est sur une piste sérieuse et va passer la main à la police judiciaire », a précisé le bourgmestre. Selon les autorités, une opération était en cours en région bruxelloise pour retrouver les auteurs de cet assaut. Selon les deux quotidiens belges, la Libre Belgique et la Dernière Heure, un suspect aurait été interpellé. Rien n'indique encore si il serait l'auteur des coups de feu. L'information n'a pas été confirmée par les autorités. Une conférence de presse du parquet est prévue dans la soirée.
LE NUMÉRO D'IMMATRICULATION RELEVÉ
Le ministre des affaires étrangères, Didier Reynders, qui se trouvait dans le quartier aux moments des faits, a été l'un des premiers à se rendre sur les lieux, et a prévenu les secours. A l'antenne de la RTBF, M. Reynders a indiqué qu'il s'était rendu sur place, après avoir entendu des tirs. Il a constaté la présence de deux corps dans le hall d'entrée du Musée. Selon des témoins, les auteurs de l'attaque étaient deux. L'un serait resté à proximité de la voiture, garée en double file, pendant que son comparse, qui portait « un sac noir », passait à l'attaque. Des témoins ont relevé la plaque d'immatriculation du véhicule.
M. Reynders a immédiatement réagi sur le réseau de microblogging Twitter :
Choqué par les meurtres commis au musée juif, je pense aux victimes que j'ai vues sur place et à leurs familles
Un témoin, Alain Sobotik, a déclaré avoir vu « deux corps » dans le hall d'entrée du musée. « Il y avait une jeune femme, avec du sang sur la tête. Elle tenait encore un dépliant dans les mains, on aurait dit une touriste », a déclaré ce témoin, joint par téléphone. « Un peu plus loin à l'intérieur, il y avait un monsieur étendu. Un pompier palpait sa carotide, mais je pense qu'il était mort », a ajouté M. Sobotik, qui habite le quartier et qui affirme avoir croisé Didier Reynders sortir « livide » du musée.
LA PISTE DE L'ATTENTAT ANTISÉMITE ÉVOQUÉE
« Cela ressemble très fort à un acte voulant semer la terreur », a estimé le bourgmestre de Bruxelles, indiquant que beaucoup de Bruxellois sont sous le choc après cette attaque. Le premier ministre, Elio Di Rupo, s'est lui aussi dit « très choqué ». « On ne peut pas tirer de conclusion définitive, mais c'est une fusillade qui s'est déroulée dans un lieu qui n'est pas anodin, il y a de fortes présomptions » qu'il s'agit d'un acte antisémite, a estimé la ministre de l'intérieur Joëlle Milquet à La Libre Belgique. Cette dernière également présente dans le quartier au moment des faits, s'est rendue immédiatement sur les lieux.
François Hollande a fait part dans la soirée de « sa vive émotion et condamne avec la plus grande force la tuerie effroyable intervenue au Musée Juif de Bruxelles ». Le président « exprime l'entière solidarité de la France au peuple belge dans cette épreuve et adresse ses profondes condoléances aux familles des victimes », ajoute-t-il dans un communiqué.
Didier Reynders restait prudent quant à la nature antisémite de l'attaque. « Mais c'est évident qu'on pense à ça », a-t-il dit, en citant l'affaire « Mohamed Merah », du nom du Franco-algérien qui avait tué quatre juifs, dont trois enfants, et trois militaires à Toulouse, dans le sud-ouest de la France, en 2012.
« C'est un acte terroriste, l'assassin est entré délibérément dans un musée juif », a déclaré le président de la Ligue belge contre l'antisémitisme (LBCA), Joël Rubinfeld. « Cela devait hélas arriver, il y a eu une libération de la parole antisémite. C'est le résultat inévitable d'un climat qui distille la haine », a déploré le président de la LBCA.
Le président du consistoire central israélite de Belgique, Julien Klener, a indiqué à la Libre Belgique qu'il « n'y a pas eu de menaces récentes sur le Musée juif de Belgique ». Le Musée juif de Belgique se trouve dans une zone sous haute surveillance, non loin de la synagogue de Bruxelles qui a, par le passé, été la cible d'attentats. En 1982, un homme armé d'un pistolet-mitrailleur avait ouvert le feu à l'entrée de la synagogue de Bruxelles, située à quelques centaines de mètres de la place du Sablon, faisant quatre blessés, dont deux graves.
Les autorités belges s'inquiètent depuis des années du départ de combattants jihadistes et des actes qu'ils pourraient commettre lors de leur retour au pays. Selon les chiffres officiels, quelque 200 ressortissants belges sont partis combattre en Syrie, dont une cinquantaine sont rentrés.