Les églises sous haute vigilance pour Noël
La piqûre de rappel est bienvenue : le ministre de l’intérieur a adressé aux préfets, le 16 décembre, un « télégramme » recensant les mesures mises en place dès le 23 avril, au lendemain de l’attentat évité contre une église de Villejuif (Val-de-Marne). Bernard Cazeneuve demande « une vigilance toute particulière à l’égard des messes et offices de Noël qui, tout à la fois, concentreront en un même lieu un public nombreux et pourraient constituer des cibles d’une exceptionnelle force symbolique », ordonnant de prendre contact avec les responsables diocésains et leurs « référents sécurité ».
A Pontoise (Val-d’Oise) comme ailleurs, on adapte ces consignes aux réalités locales. La cathédrale Saint-Maclou, édifice gothique du XIIe siècle, est prête, avec crèche et bouquets de fleurs, à accueillir les messes de Noël des 24 et 25 décembre. Une trentaine de paroissiens ont été mobilisés : par groupes de quatre ou cinq, ils filtreront les entrées par une seule porte à la fois, en surveillant particulièrement les sacs d’une certaine taille. « Nous connaissons déjà bien les fidèles et les habitués, mais Noël est, bien sûr, l’occasion d’un plus large rassemblement », explique Pierre Machenaud, curé de Pontoise.
« Le but est d’abord d’être accueillant en ces temps où nous ressentons plus encore le besoin de fraternité et d’attention les uns aux autres, juge Vincent Malherbe, retraité de fraîche date et paroissien très actif, qui dirigera les opérations. Il y a huit jours, à l’occasion d’une messe télévisée, nous avons déjà pris des précautions particulières et nous sommes donc rodés. »
Affluence nouvelle
Comme beaucoup de responsables de paroisses l’ont constaté, les attentats de novembre ont suscité une affluence nouvelle dans les églises, et ce Noël pourrait être encore plus fédérateur que d’habitude pour les familles chrétiennes dont c’est parfois la seule occasion de participer à une messe.
« Les catholiques ne sont pas dans une psychologie sécuritaire », admet Mgr Olivier Ribadeau-Dumas, porte-parole de la Conférence des évêques de France, dont les membres ont été associés aux échanges au sein de la commission de sécurité des lieux de culte, coordonnée par le préfet Thierry Coudert et mise en place dès janvier, après les attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher. Chaque évêché est désormais doté d’un référent sécurité, en contact permanent avec le directeur de cabinet du préfet. Ceux-ci déterminent en commun les églises nécessitant une protection renforcée en raison de leur affluence ou de leur intérêt touristique. Sur les 45 000 lieux de culte catholiques du pays, 140 à 150 relèvent de cette catégorie.
La cathédrale de Strasbourg est un de ces édifices très visités, et les autorités catholiques prennent au sérieux les consignes déjà en vigueur depuis qu’a ouvert le marché de Noël, début décembre. « Nous serons très stricts et nous prendrons des mesures inédites : les paroissiens bénévoles, que nous avons formés à cela, filtreront les entrées, feront ouvrir les sacs, interdiront l’entrée aux porteurs de gros bagages ou de sacs à dos. Ils ne feront pas de palpations mais demanderont tout de même à ouvrir les gros manteaux, précise le chanoine Bernard Xibaut. Nous redoutons les files d’attente et ne tolérerons pas de gens debout. Dès que toutes les chaises seront occupées, nous fermerons les portes de la cathédrale. »
Des sociétés privées de sécurité
Le ministre de l’intérieur a aussi insisté sur la nécessité de veiller aux véhicules stationnés à proximité des lieux de culte, quitte à ce que les maires prennent des arrêtés temporaires d’interdiction d’y stationner. A l’extérieur, ce seront donc des patrouilles de police et de gendarmerie, « dynamiques » (en mouvement) ou « statiques », qui assureront la surveillance.
A Paris et dans sa banlieue, une dizaine d’édifices sont très surveillés et pour les lieux les plus touristiques, comme le Sacré-Cœur de Montmartre, Notre-Dame de Paris et la basilique de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), il a été fait appel à des sociétés privées de sécurité. « Nous mobilisons beaucoup d’agents à Notre-Dame et Saint-Denis, confirme Arnaud Demaret, directeur de la société Elytis. Ce travail est stressant, exige de la rapidité, du sang-froid, de la courtoisie. Comme il y a beaucoup de monde, des millions de visiteurs, il faut aller très vite et nous craignons toujours de louper quelque chose. »
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