Quelle place pour les femmes dans l'Église?
Le pape François voudrait "une présence féminine plus incisive" dans l’Église. Les femmes doivent-elles prendre de plus grandes responsabilités ?
Les grandes religions font facilement figure de derniers bastions de la misogynie. Car dans nos pays développés, les femmes sont des ministres aux compétences reconnues, elles avancent vers la parité en politique, sont chefs d'entreprise, majors à l'X. Très majoritairement au travail entre 25 et 34 ans, elles sont en moyenne plus diplômées que les hommes, et leurs rapports avec eux bouleversent notre société. Le fait est là : au siècle de l'avènement des femmes, aucune place ne leur est plus ni assignée d'office ni d'emblée interdite. Pendant ce temps, des Églises réfléchissent sur la part de responsabilité - et donc de pouvoir - qui pourrait leur revenir à l'avenir. Elles ont acquis leur indépendance et leur autonomie dans la société civile, mais elles seraient encore mineures dans certaines Églises ? Le contraste devient de plus en plus saisissant.
Quelle place pour les femmes dans l'Église?
Néanmoins, la question de la place des femmes dans l’Église en énerve plus d'un, et même plus d'une, qui voient là une fausse question. Il est vrai que les femmes exercent de plus en plus de responsabilités dans les communautés : on les voit à la tête de bon nombre d'aumôneries, de services diocésains ou nationaux, de centres de formation et de cycles théologiques. Théologiennes, elles mettent en question la lecture masculine de l’Écriture, les images de Dieu, l'anthropologie chrétienne. Elles donnent et accompagnent les Exercices spirituels de saint Ignace. La catéchèse et la transmission de la foi reposent massivement sur elles.
Rendons au christianisme ce qui lui revient : le féminisme religieux est né sur son terreau. On attend encore des théologiennes féministes juives et musulmanes. Qui plus est : la dignité des femmes et leur égalité avec les hommes sont au nombre des affirmations révolutionnaires du christianisme, et cela depuis JESUS. Mais il n'empêche : égale dignité ne veut apparemment pas dire égal pouvoir de décision dans toutes les Églises ; les femmes y ont seulement voie délibérative ou consultative.
Dans le code de droit canonique de l’Église catholique, le gouvernement, l'enseignement et le culte sont réservés aux clercs. Sacerdoce et pouvoir étant liés de fait, le débat se polarise presque exclusivement sur la possibilité d'accès des femmes aux ministères ordonnés. Or, que des femmes soient ordonnées prêtres constitue pour Jean-Paul II une impossibilité "définitive" qui engage la foi. Le débat n'a donc, pour l'instant, plus lieu d'être. En sera-t-il toujours ainsi ? On a déjà vu, dans l'histoire de l’Église, des affirmations considérées comme définitives, ultérieurement remises en question. Dans l'ensemble des Églises chrétiennes, les positions sont diverses. Cette question n'est encore vraiment pas à l'ordre du jour chez les orthodoxes, et l'unanimité est loin d'être faite. Dans cette Église, les clercs peuvent se marier avant l'ordination diaconale et les évêques sont choisis parmi les moines, forcément célibataires.
Femmes pasteurs
Chez les réformés, les femmes sont pasteurs depuis plus de quarante ans sans que, là encore, l'unanimité soit totale entre les Églises. Mais des femmes participent aux synodes comme déléguées avec voie délibérative. Église d'Angleterre les ordonne prêtres depuis 1994 et évêques depuis 2015. Mais faut-il donc ordonner des femmes pour leur donner part au pouvoir ? Et est-ce là la seule et meilleure façon de poser la question ? Pour certaines féministes, cela ne ferait que rendre les femmes complices d'un système hiérarchique et d'un mode d'exercice masculin de l'autorité, même s'il est évoqué en terme de service. Trouver un autre statut que celui de clerc pour associer les femmes au pouvoir rejoint en fait une autre réflexion théologique, encore à mener : celle des ministères au sens large et d'une Église qui, faisant sa place au sacerdoce, serait moins cléricale. Tout en sachant qu'un autre chantier œcuménique reste à ouvrir en préalable : s'interroger sur les raisons de la peur, dans les Églises, face au pouvoir des femmes.
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