Capucine MODERATION
Date d'inscription : 12/12/2011 Messages : 7544 Pays : France R E L I G I O N : catholique
| Sujet: Et si on interdisait le plastique ? Mar 11 Juin 2019, 7:07 am | |
| Et si on interdisait le plastique ?Du recyclage à la consigne en passant par la fin du tout jetable, tour d’horizon des solutions pour se passer définitivement du plastique.
- Marine Lamoureux,
- le 11/06/2019 à 18:20
- Modifié le 11/06/2019 à 18:32
Pendant une semaine en 2008, six familles de différents pays ont collecté leurs déchets en plastique. Ici en Espagne. Sergio Perez/Reuters 1. En finir avec « l’usage unique » 20 minutes d’utilisation en moyenne, 400 ans à polluer la nature. Tel est le bilan du sac plastique « à usage unique », longtemps perçu comme inoffensif. Un banal compagnon de nos courses, qui s’est avéré dévastateur pour l’environnement. Au moment de l’adoption de la loi de 2015, qui les interdit en France, le calcul avait été fait : 5 milliards de pochons distribués en caisse chaque année. Pour ce type d’objets, archétypes du « tout jetable », l’interdiction est une piste privilégiée. Une directive européenne prévoit ainsi, à compter de 2021, de prohiber les couverts et assiettes à usage unique, les pailles, les cotons-tiges, les tiges de ballons, certains gobelets et contenants de la vente à emporter, etc. En France, le petit café du matin pris à la machine, c’est… plus de 2 milliards de gobelets jetés par an.
Pour enrayer la pollution, il faut ainsi réduire nos besoins. « Bien sûr, on peut recycler, développer les matériaux de substitution, mais le premier enjeu, c’est de limiter notre consommation », insiste Jean-Charles Caudron, à l’Ademe. Certains comportements commencent déjà à changer, à la faveur des initiatives « zéro déchets » : livres – dont celui de l’emblématique famille Pichon –, tutoriels sur Internet, festivals, magasins proposant de la vente en vrac... « Il faut lever les freins : la crainte de se compliquer la vie, de modifier ses habitudes », remarque Lucie Blanchard, qui vient de lancer l’association des « Nanas zéro déchets » et la vente de kits (30 €) pour réduire les plastiques (brosses à dents à têtes rechargeables, sacs en tissu pour acheter du vrac, lingettes lavables...).
... au Japon. / Kim Kyung Hoon/Reuters
2. Mettre fin à l’obsolescence, garder et réparerConditionnés au jetable, les citoyens l’ont aussi été à l’« obsolescence ». Le robot ménager est en panne ? J’en achète un neuf. Mon smartphone – 40 % de plastique – n’est pas dernier cri ? Qu’à cela ne tienne. D’après l’Ademe, 88 % des Français changent de téléphone alors qu’il fonctionne encore (en moyenne tous les deux ans). L’obsolescence est donc autant matérielle que « marketing », au mépris des déchets générés. À l’heure actuelle, 30 millions de vieux téléphones dorment toujours dans les tiroirs des Français. Quant au « fairphone », modulable et donc réparable, il reste un petit Poucet face aux grandes marques.
Certains industriels ont toutefois décidé de s’attaquer au problème. Dans le secteur du petit équipement domestique, le groupe Seb (et ses différentes marques, Tefal, Rowenta, etc.) est un pionnier de la « réparabilité », affichant « 93 % de produits réparables ». « Cela ne se fait pas du jour au lendemain, observe Joël Trochon, directeur du développement durable du groupe. Nous y travaillons depuis dix ans et disposons d’un stock de six millions de pièces détachées, disponibles rapidement. » Sans « production maison » – le groupe compte 41 sites industriels dans le monde – difficile en effet d’assurer un tel service.Autre enjeu : le prix de ces pièces. « La réparation doit coûter moins cher qu’un produit neuf. Nous ne faisons donc pas de marge sur les pièces détachées », assure le directeur. Quant aux équipements, ils doivent être démontables, vissés plutôt que collés, etc. Afin d’éclairer le consommateur dans ses choix, le projet de loi sur l’économie circulaire, attendu en juillet, prévoit un « indice de réparabilité ». « Attention au cahier des charges de cet indice », prévient toutefois Joël Tronchon, dont les produits arborent pour le moment leur propre logo, pour attirer le chaland. « La possibilité de réparer un appareil n’est pas le critère n° 1 d’achat mais ça compte », poursuit le directeur, qui voit dans cette politique « un levier de loyauté et de fidélité à la marque ». Côté environnement, un produit réparé, c’est moins de ressources en amont, moins de déchets en aval. « Si au lieu de changer d’équipement tous les deux ans, je change tous les dix ans, je divise par cinq ma consommation de plastique », résume Jean-Charles Caudron, à l’Ademe. ... en Grèce. / Alkis Konstantinidis/Reuters
3. Recycler… mais sans tout en attendreDès la campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait affiché un objectif ambitieux : « tendre vers 100 % de plastiques recyclés en 2025 », alors que le taux de recyclage est d’environ 22 % aujourd’hui – le reste part à l’incinération (43 %) ou en décharge (34 %). Pour les uns, cet objectif, qui servira de fil rouge au prochain projet de loi, permet d’impulser une dynamique. Pour d’autres, il focalise l’attention sur une mauvaise solution. « Raisonner exclusivement en termes de recyclabilité n’est pas pertinent pour construire un modèle durable autour du plastique », considère Zero waste.Pour l’association, le recyclage pose en l’espèce trois problèmes. Le premier : les plastiques sont souvent difficiles à recycler, notamment pour des raisons techniques (type de résine, matériaux composites, etc.). Des recherches sur des procédés chimiques de séparation sont actuellement menées, notamment par Serge Ferrari, l’un des leaders des matériaux composites souples. Mais les applications doivent encore changer d’échelle.
Le second a trait à l’hygiène et à la sécurité, notamment pour le plastique alimentaire ou médical. « Il est difficile d’envisager du plastique recyclé pour certains usages, en raison des traces de polluants, souligne l’expert de l’Ademe. Personne, à l’hôpital, n’accepterait une perfusion en plastique recyclé ! » Dans ces domaines, l’usage de plastique neuf reste donc pertinent. « Les choses évoluent néanmoins, poursuit-il. Il n’y a pas si longtemps, on n’imaginait pas des bouteilles d’eau en plastique recyclé, banales aujourd’hui. »Dernière difficulté : en matière de recyclage, il n’existe pas de « boucle parfaite » – c’est particulièrement vrai pour le plastique. « Si vous avez 100 bouteilles à recycler, vous n’aurez pas 100 bouteilles recyclées en fin de processus », même pour le PET (poly(téréphtalate d’éthylène), dont le recyclage est bien maîtrisé, relève Jean-Charles Caudron. À chaque cycle, de la matière est perdue – il faut donc introduire du plastique neuf. En outre, il perd en qualité. « On ne retrouve pas les mêmes performances, par rapport à la chaleur, la solidité, remarque Joël Tronchon, chez Seb. Il faut de gros investissements. » Comme d’autres, il plaide pour une « TVA circulaire », moindre pour les produits contenant de la matière recyclée. ... en Inde. / Danish Siddiqui/Reuters
4. La consigne, de nouveau en vogueLe système, bien connu pour le verre, était tombé en désuétude. Sur le papier, il est pourtant redoutablement efficace : une bouteille utilisée moyennant une consigne, collectée en restituant la somme, nettoyée, puis remplie à nouveau. Ni matière neuve, ni déchets.Le groupe Carrefour, associé à la start-up TerraCycle, lui redonne des couleurs via le système Loop, « premier site d’e-commerce en Europe avec consigne et contenants durables », vante le communiqué. Le principe ? Les courses sont livrées dans un gros sac, avec des emballages réutilisables. La consigne avancée par le consommateur – pour l’instant à Paris et sa région – est remboursée à la restitution : il suffit de remettre le contenant vide dans le gros sac, collecté à domicile. Des marques comme Coca-cola, Danone ou Fleury Michon ont accepté de jouer le jeu. « L’initiative est positive mais elle est encore expérimentale, relève Benoît Renauld, le DG de Rainett en France, qui commercialise des produits d’entretien « écolos ». Sur le principe, la consigne est une bonne stratégie pour lutter contre le sur-emballage, mais cela exige une très grosse logistique de collecte ». À court terme, Rainett fait plutôt le pari du plastique recyclé et recyclable pour toucher le plus grand nombre à des prix raisonnables. ... en Israël. / Corinna Kern/Reuters
5. Du plastique écolo, vraiment ?Et si l’on parvenait à produire des plastiques qui ne soient pas nocifs pour l’environnement ? L’hypothèse est séduisante mais il reste beaucoup à faire. En commençant par éviter l’expression de « bioplastiques », qui sème la confusion. Mieux vaut distinguer les « plastiques végétaux » ou « biosourcés », issus de sources renouvelables (canne à sucre, chardon, maïs, pommes de terre), des « plastiques biodégradables ». Avec là encore, un large éventail. « Biodégradable ne veut pas dire que le plastique va disparaître tout seul au fond du jardin », avertit Jean-Charles Caudron, à l’Ademe. Il faudra souvent en passer par des procédés thermiques ou chimiques.Il n’empêche : une grande attention est portée à ces recherches, en particulier pour le secteur de l’emballage. On trouve déjà des plastiques végétaux dans de nombreux secteurs (sacs de caisse, cosmétiques, bouteilles, etc.) – ce plastique n’étant pas nécessairement biodégradable, insiste l’Ademe. Il pose aussi la question de la concurrence avec les cultures alimentaires.Par ailleurs, certaines recherches semblent prometteuses. À l’image de celle sur le miscanthus, un roseau venu d’Asie, qui peut être transformé en une pâte aux applications diverses, « 100 % biosourcée, 100 % biodégradable », assure Olivier Suty, directeur de cabinet de la communauté de communes de Moret Seine et Loing (Seine-et-Marne), impliquée dans ces recherches. « Un brevet a été déposé en 2015 sur le procédé de fabrication » de ce plastique qui sert déjà, affirme-t-il, à la fabrication de cercueils et de revêtements de sol. et aux Etats-Unis. / Brian Snyder/Reuters ------------------------------------------------------ Les déchets plastiques, un fléau mondial – Chaque année, 8 millions de tonnes de plastiques se retrouvent dans les océans, d’après le rapport de la Fondation Ellen Macarthur. Cela « équivaut à décharger chaque minute le contenu d’un camion poubelle en mer », les emballages constituant la part « la plus ample » de cette pollution.– Si rien ne change, les océans pourraient contenir une tonne de plastique pour trois tonnes de poissons d’ici à 2025 et, en 2050, plus de plastiques, en poids, que de poissons, précise le rapport.– À l’heure actuelle, plus de 90 % des plastiques produits sont dérivés de ressources fossiles vierges, soit 6 % de la consommation mondiale de pétrole.– Zero waste a estimé la consommation annuelle de différents produits plastiques à usage unique par la population française. À titre d’exemple : 40 gobelets de café en moyenne par personne par an (plus de 2 milliards au total), 996 mégots (soit près de 54 milliards), 96 bouteilles (6,3 milliards).https://www.la-croix.com/Sciences-et-ethique/Environnement/interdisait-plastique-2019-06-11-1201028184? |
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