Date d'inscription : 12/12/2011 Messages : 7549 Pays : FranceR E L I G I O N : catholique
Sujet: Missionnaire avec saint Paul - série Théodom Ven 01 Mar 2024, 6:49 am
Chaque dimanche de carême, le frère Jean-Michel Poffet vous propose un éclairage biblique en 7 vidéos sur le thème de la Mission selon Saint Paul. ...
frère Jean-Michel Poffet
Frère Jean-Michel Poffet habite à Fribourg, en Suisse. Il est bibliste et a été directeur de l'École biblique et archéologique française à Jérusalem de 1999 à 2008 et en 2023. Il a publié de nombreux ouvrages : La Patience de Dieu. Essai sur la miséricorde (Desclée, 1992), JESUS et la Samaritaine (Cahier Évangile, Cerf, 1995), Paul de Tarse (Nouvelle Cité, 1998), Heureux l'homme, la sagesse chrétienne à l'école du Psaume 1 (Cerf, 2003), Regards sur le Christ (Parole et Silence, 2017), 7 petits mots de l’Évangile (Cerf, 2021). Cette série ThéoDom fait suite à la réflexion que frère Jean-Michel a mené en écrivant : "Évangéliser, oui mais comment ?" (Cerf, 2022).
Capucine MODERATION
Date d'inscription : 12/12/2011 Messages : 7549 Pays : FranceR E L I G I O N : catholique
Sujet: Re: Missionnaire avec saint Paul - série Théodom Ven 01 Mar 2024, 6:51 am
2. La Rencontre, origine de la mission.
« Malheur à moi si je n'annonce pas l'Évangile ! » (1 Corinthiens 9, 16) C'est un cri de saint Paul. Oui, c'est toute la question. Quand on est chrétien, on désire être témoin du Christ mais comment ?
Je vais donc aborder cette question pas seulement de l'Évangile mais d'évangéliser, c'est-à-dire : porter la Bonne Nouvelle, en particulier aux pauvres, - pas seulement sociologiquement – à tous ceux qui ont le cœur brisé, à tous ceux qui, peut-être, désespèrent de la vie, et leur parler d'une Bonne Nouvelle, une nouvelle essentiellement bonne, parce qu'elle parle de la victoire du Christ sur la mort, sur le péché et sur la violence.
La résurrection et la mission
Et pour cela j'aimerais commencer par l'envoi du Christ après Pâques. A la fin des Evangiles, par exemple la finale de l’Evangile de Marc, au chapitre 16 : « Allez dire à ses disciples et à Pierre qu'il vous précède en Galilée » (Marc 16, 7), pas seulement dans la Galilée au nord de la Terre Sainte aujourd'hui, mais sur les chemins de la mission.
C'est encore plus clair dans la finale de l’Evangile de Matthieu, au chapitre 28 : « Allez donc de toutes les nations, faites des disciples les baptisant au nom du Père du Fils et du Saint-Esprit et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde. » (Matthieu 28, 19-20). Vous savez que c'est le sens du mot « Emmanuel », « Dieu avec nous », pour toujours.
Ou encore JESUS à Marie-Madeleine qui lui apparaît après Pâques : « Va trouver mes frères et dis-leur : je monte vers mon père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. » (Jean 20, 17)
Tout commence donc par cette rencontre avec le Christ vivant, qui nous envoie témoigner de lui. Et puis il y a quelqu'un d'autre qui a été envoyé comme témoin de l'Évangile. C'est précisément Paul de Tarse.
Paul, l’ancien tradi-violent
Paul qui était un juif, c'était un pharisien. « Pharisien » ça veut dire « séparé ». Le mouvement des pharisiens se constitue dans les deux derniers siècles avant JESUS-Christ environ, dans un moment où les mœurs païennes pesaient fortement sur la société juive, un peu comme aujourd'hui. Et par conséquent, les croyants par mesure de fidélité, mais aussi de protection, se considèrent comme des résistants spirituels, des séparés de l'intérieur, des pharisiens.
Et Paul dit bien qu’il est fier de ses origines pharisiennes, il est un juif circoncis le 8e jour, de la race, plutôt de la lignée d'Israël, de la petite tribu de Benjamin, mais surtout quant à la loi, un pharisien, il ajoute quant au zèle, un persécuteur de l'église. Parce qu’il n’est pas seulement un tenant de l'observance de la loi mais il le fait jusqu'à être violent.
Et puis quant à la loi, l'observance de la loi, un homme irréprochable. Il le dit encore dans le début de l'épître aux Galates : « Vous connaissez ma conduite autrefois dans le judaïsme quand je surpassais tout le monde ». Eh bien cet homme qui était au-dessus, qui surpassait tout le monde, qui était un fidèle jusqu'à être violent pour les traditions des pères, un « tradi violent », cet homme-là va être retourné par le Christ au chemin de Damas. Et dorénavant, ayant rencontré JESUS, il ne sera plus le même.
La conversion de Paul, départ de sa mission
Pour Paul de Tarse, la rencontre avec le Ressuscité se fait au chemin de Damas, alors qu’il partait persécuter des Chrétiens. Pourquoi ? Il avait entendu dire lui, comme juif observant pharisien, qu’un groupe de croyants appelés les nazoréens, les compagnons de JESUS de Nazareth, prétendaient qu’était venu le Messie et que c'était ce JESUS qui avait été condamné par les autorités juives pour non-observance de la loi et condamné par les Romains au terrible supplice de la croix. Pour lui c'est tout simplement impensable, qu'un homme condamné pour non-observance de la loi, soit le Messie d'Israël, et que quelqu'un qui meurt de cette manière, soit le Messie qu'il attendait.
Donc c'est le Christ qui le rencontre et qui le jette à terre, d'une certaine façon, et qui va s'emparer de son cœur et s'emparer de sa vie. Saint Jean Chrysostome a un très beau commentaire sur ce passage. Il dit que JESUS a appelé les disciples au bord du lac de Tibériade quand ils réparaient leur filet, mais pour Paul, c'est le Christ du haut du ciel qui l’a pris dans son filet. Et à partir de ce moment-là, le Christ s'entretient avec Paul dans son cœur, écrit Jean Chrysostome : « Quand le Seigneur daigna révéler en moi son fils » (Galates 1, 16). Il comprend alors que JESUS est vivant, que c'est bien le Crucifié détesté, que c'est maintenant ce Christ vivant qui l’envoie et qui l’envoie, lui, Paul en particulier, pour porter l'Évangile au loin, c'est à dire aux païens, à tous ceux qui, d'une manière ou de l'autre, sont loin d'une observance stricte de la loi, soit qu’ils ne l'aient pas connue, soit qu’ils sont pécheurs. Et Paul doit aller leur dire que le Christ est mort pour eux. Il est mort pour tous.
Être touché avant de témoigner
Donc de même que à la fin de l'Évangile on voit le Christ envoyer les disciples pour témoigner de lui, on voit aussi que Paul est envoyé par le Christ auréolé de la lumière de Pâques, pour porter cette Bonne Nouvelle. Et Paul le fera jusqu'à Rome, la ville de son martyre.
Pour être un témoin de l'Évangile, il faut donc d'une part être touché par le Christ, que cet Évangile, cette Bonne Nouvelle soit bonne pour moi et qu'elle soit à la source de ma joie et de mon espérance et d'autre part il faut être envoyé et c'est comme ça que le Christ envoie ses disciples à la fin de l'Évangile comme aussi il envoie Paul après s’être saisi de lui au chemin de Damas.
Capucine MODERATION
Date d'inscription : 12/12/2011 Messages : 7549 Pays : FranceR E L I G I O N : catholique
Sujet: Re: Missionnaire avec saint Paul - série Théodom Sam 02 Mar 2024, 6:54 am
3. La Résurrection, fondement de la mission.
« Le Christ est ressuscité ! alléluia ! » C'est ce que nous chantons dans la nuit de Pâques. Peut-être oublions-nous parfois qu’auparavant, il y a eu le vendredi Saint, le scandale de la croix, la longue attente du samedi Saint. Et on peut dire que, d'une certaine façon, le Christianisme est un désespoir surmonté.
Pour expliquer cela, je vais partir des rencontres du Christ avec les disciples, après Pâques.
Les désespérés
Et je commencerai par Marie-Madeleine. Marie-Madeleine, est-ce que le matin de Pâques elle se dit : « Je vais aller au tombeau mais en fait le Christ est ressuscité, il nous l'avait dit… » ? pas du tout ! Elle veut aller se recueillir au tombeau. Elle voit le tombeau ouvert et qu'est-ce qu'elle dit ? « On a enlevé le Seigneur et je ne sais pas où on l'a mis. » Elle est tout en pleurs, perdue dans son chagrin.
Les disciples d'Emmaüs. Les disciples d'Emmaüs, ils sont en train de quitter Jérusalem alors que le Seigneur leur avait demandé d'y rester et qu'est-ce qu'ils disent lorsque JESUS les approche sans être encore reconnus par eux ? En effet, ils n'ont pas la foi, ils ne peuvent pas le reconnaître. Ils le prennent pour le jardinier : « Tu es bien le seul à ne pas savoir ce qui s'est passé… Nous attendions, nous, qu'il allait restaurer Israël etc… Et voilà déjà trois jours que tous ces événements se sont passés, sa mort etc… » (Luc 24, 17). Et donc ce sont des disciples déçus de Dieu, en colère même, et en tout cas qui partent. Voilà. Ils abandonnent le terrain.
Thomas ! Thomas, il n'était pas là un dimanche matin, alors que les chrétiens s'étaient rassemblés. Ils lui disent que le Christ leur est apparu, qu'il est vivant et Thomas de leur dire : « moi si je ne mets pas mon doigt dans son côté, dans ses plaies, je ne croirai pas. » Donc lui, c'est un sceptique, ou un croyant difficile. C'est-à-dire que JESUS ne lui fait aucun reproche, mais Thomas veut être sûr que ça n'est pas simplement une idée. Le Christ avait dit qu'il vivrait, donc il doit être vivant ! Les disciples ont assisté à la mort de JESUS, ils l'ont vu torturé, et par conséquent, il veut être sûr que JESUS est vivant. Et le Christ va être vivant devant lui.
Les disciples dont parle Mathieu aussi à la fin de l'Évangile, certains croient mais d'autres eurent des doutes (Matthieu 28, 17).
Une rencontre qui guérit
Alors, je trouve très beau ce réalisme des Evangiles, qui nous montre qu’on ne passe pas comme ça en chantant, du vendredi Saint au matin de Pâques.
Il y a le choc de la mort. Il y a le grand silence du samedi Saint. Et puis il y a la rencontre, la rencontre avec le Christ vivant qui console Marie-Madeleine, qui guérit le doute de Thomas, qui guérit le doute aussi des disciples (la finale de Mathieu) qui guérit le scepticisme des disciples d'Emmaüs et qui ensuite leur dit : « la paix soit avec vous ». Ou à Marie-Madeleine, qu’Il appelle par son nom et alors elle se tourne vers Lui et elle mesure alors que c'est bien JESUS qui est vivant et qui est devant elle.
Départ de mission
C'est donc tout le témoignage rendu à l'Évangile qui part de là. Nous sommes les témoins d'un Christ vainqueur de la mort, du péché, de la violence et c'est ce Christ qui nous envoie porter, et sa paix, et son espérance et cette Bonne Nouvelle.
Paul
Cela est décisif aussi pour Paul, parce que, sur le chemin de Damas, quand le Christ lui est apparu, Paul comprend en un instant, premièrement que c'est bien ce JESUS de Nazareth crucifié qui est vivant, et que c'est ce Christ vivant qui maintenant va diriger sa vie et que ce n'est plus la loi, lui qui était un apôtre irréprochable, mais c'est le Christ vivant, et c'est lui qui l'envoie maintenant comme témoin.
Et cela va avoir des conséquences pour Paul, depuis sa première lettre aux Thessaloniciens et à travers toutes ses lettres, on voit que Paul est le témoin de ce Christ lumineux de Pâques, et c'est cette orientation vers la Résurrection qui va qualifier la vie des Chrétiens, toute notre vie, ce que nous croyons, ce que nous vivons, les combats que nous menons. Il doit y avoir un quelque-chose de cette lumière de Pâques qui passe et c'est très beau.
Le temps se fait court
Par exemple dans la première lettre aux Corinthiens, au chapitre 7, Paul écrit aux Corinthiens : « le temps se fait court » (1 Corinthiens 7, 29-31). En fait c'est un terme de marine, c'est-à-dire, on a cargué les voiles, on a réduit la voilure du bateau, parce qu’on est en train d'arriver au port et si on ne le fait pas, eh bien le bateau va taper dans les pierres du port. Par conséquent, on ralentit la vitesse, mais parce que on voit le but du voyage, qui est là. Et la conséquence : « que désormais ceux qui ont femme vivent comme s'ils n'en n'avaient pas, que ceux qui pleurent, comme s'ils ne pleuraient pas, ceux qui sont dans la joie, comme s'ils n'était pas dans la joie, ceux qui achètent, comme s'ils ne possédaient pas et ceux qui usent de ce monde, comme s'ils n'en usaient pas vraiment, car elle passe la figure de ce monde. » (1 Corinthiens 7, 29-31).
Alors le Chrétien n'est pas quelqu'un qui fait semblant. C'est pas ça.
Mais même si vous êtes dans la joie, rendez grâce à Dieu mais n'oubliez pas qu'il y en a d'autres aussi, qui passent par le chagrin. Vous pleurez, vous avez perdu un être cher, vous êtes dans la détresse. Que cette détresse ne soit pas le tout de votre vie.
Vous usez de ce monde, eh bien oui, vous menez votre métier, vos affaires… Que ce ne soit pas le tout de votre vie. Laissez toujours un espace pour cette orientation de votre vie vers le Christ JESUS, puisque notre vie ne s'arrêtera pas à notre mort, mais c'est vers Lui que nous allons, que nous vivons. C'est Lui que nous prions, et ça, ça donne un air pascal à toute notre existence.
Pour aller plus loin : frère Jean-Michel Poffet, Évangéliser oui, mais comment ? Paris, Cerf, 2022.
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