Le livre dont je vous parle aujourd'hui fait du bruit dans l'Église et a été fait pour nous remettre en question. Il a pour titre "J'aimerais vous dire" de Mgr Albert Rouet, aux éditions Bayard, 343 pages, 19 euros.
Mgr Albert Rouet est archevêque de Poitiers depuis plus de quinze ans. Il s'est entretenu avec Dennis Gira, théologien, journaliste et auteur de nombreux livres.
Ce livre est beaucoup plus qu'un simple entretien. C'est le témoignage exceptionnel de Mgr Rouet, conscient de ses responsabilités envers l'Évangile et envers l'Église. Il nous confie ce qu'il considère comme l'essentiel, en toute franchise.
Il choisit lui-même de résumer l'esprit de ce livre en disant :
"L'Église connaît elle aussi la tentation de se replier sur elle-même, de croire qu'avec la matérialité des mots, la rigueur des règles, elle résoudra les questions de l'homme. C'est une tentation, et je voudrais vous dire qu'il n'est pas forcément bon ni fécond d'y succomber. Donc, en ce sens-là, ce livre témoigne d'un peu de résistance, calme, sereine. On ne peut pas engager la vie d'une Église dans tous les durcissements, sinon elle perd sa signification."
En son premier chapitre il parle de son illustre prédécesseur St Hilaire de Poitiers, de sa vie , sa conversion, ses résistances, pour nous dire qu'il est pour lui un témoin fort d'actualité. Car de son temps charnière entre la fin de l'empire romain et un nouveau temps, comme nous avec la mondialisation. Il nous dit que revenant à la méditation de toutes les Écritures, et se centrant sur une recherche de Dieu et contact avec Jésus, tout en assimilant le langage du peuple, Hilaire s'oppose à l'esprit du moment. Ce temps des Romains est très hiérarchique et par copie la religion catholique devient arienne , c'est-à-dire avec une hiérarchie entre Dieu et les homme où Jésus est intermédiaire, fait fils de Dieu, et non Dieu depuis toujours. Hilaire annonce un évangile où la Trinité est redécouverte comme base des nouvelles relations en société plus égalitaire, fraternelle, communautaire et ouverte aux questions comme Jésus en son temps. Cela fait choc et il sera exilé en Orient où il écoute les évêques là-bas et complète sa conversion, et à son retour il lutte, parle et sera écouté.
Le deuxième chapitre a pour titre "La justesse des mots" et il m'a ramené à la grande intuition de Marcel Légaut : l'Église pour être crédible doit vivre la réalité de la foi qui dépasse les mots, avant de les dire, il ne faut pas se payer de mots !! Elle doit en même temps entrer dans le langage du siècle pour en comprendre les fondements. Mais surtout elle doit être dans une relation de recherche, de désir, de communication avec Dieu par la prière en Jésus éclairée par l'Esprit Saint pour que les mots par lesquels elle annoncera la foi soient un pont et un témoignage entre la pensée d'un peuple et les réalité de sa foi vécue, de sa relation à Dieu.
Le chapitre trois nous parle du "questionnement et du doute", et Mgr Rouet nous dit de ne pas nous bloquer en des certitudes mais d'être des chercheurs de la Vérité, tendus vers l'amitié avec Jésus dans le désir de mieux le connaître ; de n'avoir pas peur des questions et des doutes qui doivent nous amener plus loin dans un meilleur contact et connaissance de Dieu Père infini et miséricordieux. Ces passages à travers le doute et le questionnement, la réflexion et la recherche dans les Écritures, nous purifient et nous permettent d'être humbles, pauvres et authentiques envers les hommes nos frères.
Le chapitre quatre a pour titre "Qu'est-ce que la vérité?". L'auteur fait un premier constat : avec la globalisation du monde et le triomphe du libéralisme, le monde ne cherche plus la vérité et les grandes idées, il consomme, il est sa vérité, car il vit. Mais dans un deuxième temps il nous dit que la vérité se goûte plutôt qu'elle ne s'acquiert, elle est dans la vie et l'agir, dans la relation et la confiance en une parole vécue pour une rencontre. "Qui fait la vérité vient à la lumière". Elle est toujours dans le non dévoilé et la reconnaissance de sa pauvreté, elle est dans l'espérance d'une rencontre par le vécu de la parole de Jésus".
Le chapitre cinq est "l'identité chrétienne". Il nous parle d'un monde qui n'a plus d'espérance (surtout les pauvres) car les idéologies ont failli. Reste un occident qui crée 'le même" partout : hôte identique à travers le monde, costume identique etc., et en face l'Église a la tentation de s'identifier au minimum, soit par une attache à une forme de liturgie, soit par un principe de moeurs (contre l'avortement etc.) au détriment de l'ensemble de sa doctrine sociale globale. Elle s'en sortira en prenant le temps de l'écoute des autres dans l'oubli de soi et une fidélité, comme Jésus, à l'évangile qui cherche la volonté du Père sur les hommes aimés de Dieu.
Le chapitre six parle de "l'altérité", c'est la reconnaissance de l'autre, sa découverte, l'acceptation de son originalité, de sa différence, de son respect. L'Église y attache une grande importance car dans la Bible l'accueil de l'étranger est primordial, c'est une des reconnaissances de la présence de Dieu en Jésus dans l'autre. Mais tout accueil demande d'être concret pour que l'autre ait un lieu où vivre son intimité, donc pas d'accueil sans habitation, moyen de subsistance, possibilité d'exprimer sa culture et religion. La catholicité de l'Église est une communion de groupe différents et originaux et non une uniformité culturelle.
Le chapitre sept est titré "L'Église communion". Il nous dit que devant le doute de la pertinence de l'Église pour le commun des mortels, il ne faut plus se baser sur les paroisses territoriales mais sur des groupes de croyants vivants et fraternels, qui partagent une vraie connaissance et prière avec Jésus et témoigne d'une Église fraternelle qui s'aime et au service de qui viennent des prêtres, vivant l'essentiel de leur sacerdoce sacramentel.
Le chapitre huit a pour titre "Le baptême: Fondement de tout engagement chrétien". Mgr Rouet nous dit là que la bonne vision de l'Église voulue par Jésus et st Paul est l'égalité et fraternité de base, appuyées sur le baptême qui nous fait enfants de Dieu. La prêtrise et le sacerdoce des évêques est un service pour la vie de la communauté. Mais l'appel à la sainteté est égale pour tous et s'appuie sur le baptême. Et c'est une erreur du sens du sacré païen que de survaloriser les prêtres et religieux. De plus il analyse en quoi les sacrements sont tributaires, dans leur expression, de l'histoire et des cultures, mais il doivent être des signes poreux de l'action par eux de Jésus Dieu à travers les prêtres.
Le chapitre 9 parle de " La vie spirituelle." Pour Mgr Rouet elle est en premier relation d'amour et communion. Il faut se méfier de deux pièges : le sentimentalisme avec ses émotions et d'autre part un intellectualisme avec son attachement théologique a des concept sans vie. Car Dieu trinité est relation réciproque d'amour et engagement avec les hommes en son incarnation. La vie spirituelle est écoute de la vie du peuple de Dieu dans la Bible avec son vécu et sa mise en application dans une communauté par nos relations d' écoute et action d'amour. Le tout nourri et exprimé par les sacrement qui sont la vie de l'Église.
Le chapitre 10 et dernier a pour titre " Le chrétien et la morale", où il révèle que la morale ne peut être, ni individuelle, ni un code ou loi à appliquer en obéissance pour mériter le ciel, mais un appel dans notre libre conscience d'un amour qui nous prend où nous en sommes pour nous aider, si nous le voulons, à vivre debout dans une communauté où nous nous aimons. La morale est culturelle, sociale, et choisie et vécue par une communauté. La morale est le fruit de l'évangélisation, elle doit être la réponse d'amour à Celui qui frappe à notre porte intérieure, qui attend, et qui, si on ouvre, vient festoyer en notre coeur. L'Église doit pour vivre son ferment être dans la société, à tous les niveaux, source d'une parole forte pour aider l'humanité à vivre dans l'espérance et la justice.
Voilà un livre qui n'a pas de fin car il nous convie avec Mgr Rouet à la construire dans nos vies. Livre fort et riche que je vous conseille de lire !
amitiés
paul mandonnaud
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LA MISERICORDE DE Jésus EST INFINIE