Soixante-huit ans : une vie de labeur, mais une vraie vie de cigale aussi. À tel point que Françoise (1), commerçante biterroise à la retraite, en a “oublié” de cotiser pour ses vieux jours.

Même si ce cas est extrême, la honte est, en revanche, un sentiment partagé aujourd’hui par de nombreuses personnes âgées. Pour saisir l’ampleur de leur détresse, il suffit de traîner un peu à la fin des marchés ou de se trouver un matin aux Restos du cœur.

Glaner sur les marchés

Janine glane deux fois par semaine sur un marché de Montpellier - "s’il vous plaît, ne dites pas lequel, que je ne sois pas embêtée." En fait, lorsque les commerçants rangent leurs étals et jettent les fruits et les légumes abîmés, elle fait les poubelles et récupère ce qui est consommable. "Je ne pensais pas en arriver là. Mais il est difficile de joindre les deux bouts avec 742 euros par mois (NDLR : le minimum vieillesse). Mon loyer est de 435 euros, sans compter les charges. Alors, j’économise sur la nourriture. Mon petit plaisir est le poulet que j’achète le dimanche. Ça me permet de manger un peu de viande jusqu’au jeudi..."

Les trois enfants de Janine n’habitent plus dans la région. Ils ne se doutent de rien, même s’ils savent que leur mère ne roule pas sur l’or. "Avec le début d’hiver très doux, explique encore la septuagénaire, je ne mettais pas le chauffage. Maintenant, les couvertures ne suffisent plus. Et pour m’habiller, j’ai le plus souvent recours au Secours catholique."

Elle n’a jamais travaillé et son mari, décédé il y a six ans, était employé dans un supermarché. "Entre son salaire et les allocs, on s’en est toujours sorti. On allait même en vacances en camping à Palavas. Maintenant, il ne me reste presque plus rien. De toute façon, les hommes politiques se fichent des vieux. Sauf en période d’élection..."

Les personnes âgées ne parlent pas de leur pauvreté

Si Janine s’exprime, c’est une exception. Rares sont en effet les personnes âgées qui s’épanchent sur leur misère. Béatrix, bénévole depuis quatre ans aux Restos du cœur de La Mosson, à Montpellier, le constate lors de chaque distribution de repas : "Au début surtout, ces retraités, environ 10 % de nos visiteurs, sont très gênés. Puis, quand ils nous connaissent, ils se confient un petit peu. À la différence d’autres populations qui viennent à nous, les personnes âgées acceptent tout. Elles ne demandent jamais rien. Il en va de leur dignité."

Évidemment, et heureusement, tous les retraités ne sont pas dans le besoin. À Saint-Georges-d’Orques, aux portes de Montpellier, ils sont une petite bande à refaire le monde chaque matin autour d’un café, quand ils n’enfourchent pas leurs vélos pour aller se dérouiller les jambes sur des routes de campagne. "Même si notre pouvoir d’achat a tendance à baisser, dit Maurice, nous savons que nous sommes privilégiés."

Retraité et privilégié, une rime tout de même de moins en moins riche...

CHRISTIAN VALOIS

Un témoignage poignant mais qui est hélas commun à énormément de cas en France. Voilà la place de nos ainés dans nos systèmes: va à la maison de retraite ou finis ta vie dans la précarité. Ces gens-là ne sont pas seulement les ultra-ruraux et les banlieusards mais des personnes qui étaient comptabilisés parmi la classe moyenne...
Tant que les classes moyennes ne seront pas totalement piquées au vif par ces régressions, le jeu électoraliste poussera les politiques à ne pas agir...

Je suis en train de me renseigner pour une maison de retraite pour ma belle-mère, c'est horriblement cher

J'allais justement dire : comment payer les maisons de retraite ? ça coûte entre 1500 et 2000€ minimum par mois !! et il y a une file d'attente.

Capucine a écrit:

J'allais justement dire : comment payer les maisons de retraite ? ça coûte entre 1500 et 2000€ minimum par mois !! et il y a une file d'attente.

Oui, une longue attente et pour une personne très âgée et invalide, cela peut-être troplong

C'est une véritable industrie et sans généraliser, j'ai eu peu de retours positifs sur le rapport humain. Une amie journaliste a fait une enquête à ce propos et c'est vraiment sordide dans certains établissements.

J'ai travaillé en maison de retraite en tant qu'aide soignante et j'aurais beaucoup de choses à dire.

Cela serait intéressant d'avoir ton témoignage.

A commencer par le rapport entre les aide-soignants et leur hiérarchie. Y-a-t-il un suivi et un soutien ?

DoutePieux a écrit:

Cela serait intéressant d'avoir ton témoignage.

A commencer par le rapport entre les aide-soignants et leur hiérarchie. Y-a-t-il un suivi et un soutien ?

Un suivit du travail qui est lourd, mais aucun soutien, il y a une énorme pression, mois je devais faire quinze toilettes dans la matinée avec la coupure pour le petit déjeuner, du coup les premières personnes âgées étaient lavées à sept heure du matin et la dernière à onze heure trente

Et je ne vous dis pas le bâclage du travail ni comment les pensionnaires étaient traités

Donc déjà vous deviez faire le ménage en plus du suivie du patient...ça commence par là...

A moins une société prend soin de ses vieux,à plus elle est sur le déclin.

Ni de ses vieux, ni de ses jeunes d'ailleurs.

DoutePieux a écrit:

Ni de ses vieux, ni de ses jeunes d'ailleurs.

Aussi;Le rsa réservé aux plus de 25ans,si je ne me trompe est le plus sur moyen de les mener à la délinquence voir à la prostitution.

La prostitution chez les étudiantes, un sujet encore trop tabou.

DoutePieux a écrit:

Donc déjà vous deviez faire le ménage en plus du suivie du patient...ça commence par là...

Non, je faisais juste le lit, mais cela ne laissait pas beaucoup de temps pour la toilette

D'accord, tu me rassures (un petit peu) Yvonne.

Est-ce que tu as une expérience d'aide-soignante à domicile ? Le parallèle entre cela et la profession en établissement me semble intéressant.

DoutePieux a écrit:

D'accord, tu me rassures (un petit peu) Yvonne.

Est-ce que tu as une expérience d'aide-soignante à domicile ? Le parallèle entre cela et la profession en établissement me semble intéressant.

Non, clique et maison de retraite et en maison de retraite,je suis partie dégoutée de ce que je voyais et que l'on voulait que je fasse

Si tu n'as pas envie de développer, je pourrai comprendre.

Est-ce que se sont des choses inhumaines demandé par un patron qui voit une maison de retraite comme une entreprise avec un chiffre d'affaire à respecter et pour que le business tourne, il faut libérer des lits ?

J'ai aussi travaillé dans une maison de retraite pour faire des remplacements d'aide soignante, le w.e. et des nuits.
Il n'y avait pas de médecin ni d'infirmière. J'ai eu la chance de n'avoir jamais eu de coups durs, sauf une fugue un dimanche matin mais on a retrouvé la personne assez vite, ouf !
Ce qui me coûtait le plus, c'était justement les relations avec la hiérarchie qui demandait des justificatifs pour tout. Par exemple, passer mettre des gouttes dans les yeux d'une personne, combien de temps ça me prenait ? ils n'ont jamais compris que les contacts étaient plus importants que donner des médicaments.
La directrice était surtout obsédée par la propreté des couloirs et des vitres mais ce n'était pas mon travail, heureusement.

Par contre, j'ai vu il y a peu, dans un service où j'allais visiter une personne, que pour les repas du soir (à 17h30), certaines assiettes étaient servies tout mélangé : ce jour là, c 'était de la purée et, pour aller plus vite, la femme de service avait ajouté le yaourt et tout mélangé. J'ai hurlé quand j'ai vu cela !

En quoi consiste votre formation ? La pensez-vous adapté ou incomplète ?

Ce que vous dîtes sur votre relation avec la hiérarchie semble recouper les témoignages que j'ai entendu et celui de notre chère Florence.

Merci beaucoup.

Je ne pense pas que la formation d'aide-soignante ait évolué depuis, on fait beaucoup de théorie, la pratique un peu dans tous les services hospitaliers et... on prend le travail quand il s'en trouve un : ça a été mon cas en tout cas.

Ceci dit, je ne jette pas la pierre à personne, la hiérarchie a encore une hiérarchie qui donne les subventions au dessus d'elle !!!

Merci de nuancer ma vision de profane, c'est très juste.
Donc la théorie dans la formation semble adaptée aux cas que vous rencontrez dans la réalité professionnelle.

DoutePieux a écrit:

Si tu n'as pas envie de développer, je pourrai comprendre.

Est-ce que se sont des choses inhumaines demandé par un patron qui voit une maison de retraite comme une entreprise avec un chiffre d'affaire à respecter et pour que le business tourne, il faut libérer des lits ?

Le problème c'est le rendement, alors les personnes âgées sont bousculées, on leur met des couches parce qu'on n'a pas le temps de les emmener aux toilettes, on déchire les coutures des robes dans la précipitation, on omet de frictionner le dos et les talons avant de les coucher, j'ai vu des personnes à qui on avait changé la couche sans un minimum de toilette, que l'on laissait dans le lit sans l'installer pour la nuit, sans leur donner à boire pour qu'elles urinent moins, des personnes en détresse que l'on néglige en lui lançant un "j'ai pas le temps" des personnes qui pourraient manger normalement mais a qui on mixe le repas pour aller plus vite. des toilettes bâclées, même pas un sourire, même pas le temps de discuter. une personne âgée s'est éventrée avec un couteau émoussée, pour moi, cela été la goutte d'eau qui fait déborder le vase.

Moi, j'ai refusé de faire cela, alors j'ai été remerciée, je suis sure que j'ai été regrettée par les pensionnaires

C'est bien ce que je pensais...Quand on déshumanise même le rapport à nos ainés dans l'indifférence, la perte de nos valeurs ancestrales me paraisse irrémédiable. C'est là le pire je crois: l'indifférence.
Certainement, tu as dû être regretté...

Oui, les couches ! c'est le gros problème. Quand une personne peut encore aller aux toilettes mais qu'elle demande d'y aller tous les quart d'heures, on n'a pas le temps de la conduire, de l'attendre, alors elle a des couches..
Et nous avions droit à n'avoir que 30 couches par persnnes, donc une par jour...

Dans un reportage, j'ai vu des personnes âgées "faire" les poubelles pour trouver de quoi se nourrir

et maintenant on veut leur faire payer des amendes pour cela...

Bientôt on nous taxera pour l'ait que l'on respire

Air que l'on commence à commercialiser tout comme on a commercialisé l'eau de source. Car nous ne payons que la bouteille et si nous vivons proche d'une source alors la bouteille que l'on paye et la même ou équivalente que le robinet.

Voilà où peut mener la course au rationalisme matérialiste