Le guide de la « bonne épouse du djihad »Marier les filles dès 9 ans, idéalement à 16 ou 17 ans, ne pas les autoriser à avoir un métier et leur apprendre à coudre et à faire la cuisine... C'est la vision de la femme que donne le document Femmes de l'Etat islamique : manifeste et étude de cas, publié par la brigade Al-Khansaa, composée d'une cinquantaine de femmes chargées de patrouiller dans les rues de Rakka, en Syrie, pour faire respecter l'idéologie de l'Etat islamique (EI), et parfois punir les récalcitrantes aux diktats de l'organisation djihadiste.
Ce précieux document, publié il y a un mois, a été traduit en anglais par le think tank Quilliam Foundation. S'il n'a pas été validé officiellement par les responsables de l'EI, il offre une image de la réalité du rôle des femmes dans le djihad islamiste probablement beaucoup plus fidèle que ce que publient sur les réseaux sociaux les jeunes femmes occidentales fraîchement passées dans les rangs de l'EI. Loin des images d'Epinal circulant sur le Net où l'on voit de jeunes recrues exagérer leur rôle afin d'encourager d'autres femmes à les rejoindre, la place de la femme selon l'EI semble être à la maison, loin des regards, et au service de son mari djihadiste.
La bonne épouse du djihad
« Il est toujours préférable pour une femme de rester cachée et voilée, afin de maintenir la société derrière ce voile », peut-on lire dans ce « manifeste ». Les boutiques de vêtements et les salons de beauté y sont ainsi dénoncés comme des œuvres du démon.
« Le modèle adopté par les infidèles en Occident a échoué à la minute où les femmes ont été “libérées” de leur cellule dans la maison. »
Cachée au monde extérieur, la femme doit s'éduquer, apprendre la religion et la charia, ainsi que la couture, la cuisine, et les compétences manuelles liées aux enfants. « Il est considéré comme légitime pour une fille de se marier à 9 ans. Les filles les plus pures seront mariées à 16 ou 17 ans, tant qu'elles sont toujours jeunes et actives. Les jeunes hommes ne dépasseront pas les 20 ans dans ces glorieuses générations. »
Le chercheur Charlie Winter, qui a traduit le document, explique dans The Independent :
« Le document exagère et ne représente pas une vision totalement fidèle de la réalité, mais il s'agit bien d'un traité conceptuel de ce que devrait être la vie, et c'est une chose à laquelle nous n'avions encore pas eu accès, en tout cas en anglais.
« Quelqu'un a dû prendre la décision de ne pas faire circuler de version anglaise de ce manifeste, car cela contient des idées qui ne devraient pas convenir à la femme occidentale moyenne cherchant à rejoindre le groupe. »
En effet, ce manifeste a à l'évidence été écrit à destination des femmes d'Arabie saoudite, qui, selon le document, ont souffert de « barbarisme et de la sauvagerie », forcées à la pauvreté, abusées par le système judiciaire. Des thèmes pas nouveaux, selon M. Winter, qui relève que « les thèmes de l'injustice et des règles tyranniques sont présents dans toute la littérature djihadiste ». « C'est une manière de recruter des gens — cela envoie un massage très puissant », ajoute-t-il.
En octobre, un document similaire, mais moins fouillé, avait été découvert. Il visait également les Saoudiennes, leur donnant des conseils sur comment être de « bonnes épouses du djihad » et soutenir les combattants.
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