Attentat déjoué à Paris : ce que l'on sait sur le suspect
Le Monde.fr | 22.04.2015 à 17h38 • Mis à jour le 22.04.2015 à 18h31
L'enquête avance sur le projet d'attentat que la police a annoncé avoir déjoué, dimanche 19 avril. Mercredi, le procureur de Paris, François Molins, a donné des précisions sur le profil du suspect, soupçonné d'avoir voulu commettre un attentat contre une ou deux églises de la banlieue parisienne.
La police a également établi un lien entre le suspect et le meurtre d'Aurélie Châtelain, une professeure de fitness retrouvée morte dans sa voiture, dimanche, à Villejuif (Val-de-Marne).
Qui est le suspect ?
L'homme arrêté dimanche est un Algérien de 24 ans. Etudiant en électronique à Paris, il a partagé son adolescence entre la France et l'Algérie. Il arrive en France en 2001, avec sa mère, pour rejoindre son père à Saint-Dizier (Haute-Marne). Deux ans plus tard, il doit repartir en Algérie, faute de papiers lui permettant de rester en France. Mais il reviendra en 2010, alors âgé de 19 ans, après avoir obtenu son bac en Algérie. Il quitte le domicile familial un an plus tard pour suivre des études en électronique à Reims et à Paris.
Son casier judiciaire ne fait état d'« aucune condamnation », a précisé M. Molins. Son nom figurait dans une seule procédure pour des faits de violence volontaires en août 2013, classée sans suite en raison du retrait de plainte de la victime.
Les services de renseignement connaissaient néanmoins le jeune homme depuis qu'il avait manifesté son désir de rejoindre la Syrie en 2014, a indiqué le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve. Selon les informations du Monde, il avait disparu une semaine en Turquie en février 2015. Cependant, rien ne permettaient de « justifier l'ouverture d'une information judiciaire », a précisé Bernard Cazeneuve, mercredi matin. Il faisait l'objet d'une fiche de sûreté de l'Etat, qui implique une surveillance policière « sans attirer l'attention ».
Comment le suspect a-t-il été appréhendé ?
Le suspect a été arrêté fortuitement dimanche 19 avril, a annoncé Bernard Cazeneuve. Vers 8 heures, le SAMU reçoit un appel : un homme est blessé par balle à la cuisse dans le 13e arrondissement de Paris. Le SAMU appelle alors la police qui, en remontant les traces de sang, arrive à un véhicule garé non loin de là, et dans lequel ils retrouvent un arsenal : kalachnikov, arme de poing, gilet pare-balles, munitions et gyrophare. A l'hôpital, le blessé reconnaît être le propriétaire du véhicule. Il est alors interpellé et placé en garde à vue médicalisée à l'Hôtel-Dieu.
Avant de s'« enfermer dans un mutisme complet », le suspect a affirmé s'être blessé seul en voulant jeter des armes dans la Seine. Une version jugée « fantaisiste » par le procureur de la République, et qui a été « totalement contredite » par les investigations, selon lui.
Que prévoyait-il ?
L'enquête a permis de déterminer que le suspect avait évoqué les « modalités de commission d'un attentat » avec une personne « pouvant se trouver en Syrie », a relaté François Molins. Cet homme qui serait en Syrie lui aurait demandé « explicitement de cibler particulièrement une église », a ajouté le magistrat.
Les perquisitions menées à son domicile ont permis de retrouver, outre de l'armement et du matériel de vidéo, des écrits « établissant sans ambiguïté que l'individu projetait de commettre un attentat, vraisemblablement contre une ou deux églises », a précisé Bernard Cazeneuve. Le procureur a précisé que des « documents en langue arabe évoquant les organisations terroristes Al-Qaida et Etat islamique » ont été trouvés par les policiers. Les faits ont donc été requalifiés en « association de malfaiteurs en vue de préparer un acte de terrorisme ».
Quel lien avec l'assassinat d'Aurélie Châtelain ?
Les éléments de l'enquête permettent désormais de faire le lien entre l'homme soupçonné d'avoir voulu commettre un attentat et le meurtre d'Aurélie Châtelain. La jeune femme de 32 ans a été retrouvée morte dimanche matin à Villejuif (Val-de-Marne) sur le siège passager de son véhicule, tuée d'une balle entrée par l'épaule et qui a touché le coeur.
M. Molins a en effet confirmé la présence du suspect Villejuif, « dimanche matin dans le créneau horaire où Aurélie Châtelain a été assassinée ». Le procureur a également confirmé que le sang de la victime avait été retrouvé sur le manteau du suspect et que l'ADN de ce dernier avait été retrouvé dans le véhicule de la victime, notamment sur le frein à main. Les faits ont donc été requalifiés en « assassinat en relation avec une entreprise terroriste ».
Aucune hypothèse sur les raisons précises de l'assassinat n'a été émise par le magistrat. Mais les enquêteurs soupçonnent l'étudiant d'avoir tenté, pour une raison inconnue, de voler son véhicule. Une tentative de vol manquée à l'occasion de laquelle il se serait tiré une balle dans la jambe par inadvertance.
La suite de l'enquête
L'enquête se poursuit désormais pour déterminer les complicités éventuelles et la provenance des armes saisies. Dans ce cadre, a précisé M. Molins, une personne de l'entourage du suspect a été interpellée à Saint-Dizier et placée en garde à vue. Selon une source du Monde, la compagne du suspect a été interpellée, mais le magistrat n'a pas confirmé s'il s'agissait de la même personne.
Le parquet demandera « très probablement » une extension de la garde à vue du suspect à six jours, comme le permet la loi dans le cadre d'une enquête liée au terrorisme.
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