Ce que proposent les principaux candidats à la présidentielle pour la santé
Sébastien Maillard, le 21/02/2017 à 14h27
Mis à jour le 21/02/2017 à 16h25
Emmanuel Macron, Benoît Hamon et François Fillon ont exposé leurs propositions en matière de santé lors d’un « grand oral des candidats » organisé mardi 21 février par la Mutualité française
Hôpital public, accès aux soins, financement de l’assurance-maladie… Plusieurs candidats ont présenté hier devant la mutualité française leur programme en matière de santé. Marine Le Pen, en déplacement au Liban, et Jean-Luc Mélenchon n’ont pas participé aux débats.
Étaient présents Nicolas Dupont-Aignan, candidat souverainiste de Debout la République, Benoît Hamon pour le PS, le candidat d’Europe Écologie Les Verts, Yannick Jadot, en plein pourparlers avec Benoît Hamon pour se désister en sa faveur, François Fillon (LR) et Emmanuel Macron pour « En marche ! ».
Emmanuel Macron : mettre les mutuelles en concurrence
Premier interrogé, le candidat d’« En marche ! » a décliné ses propositions en matière de santé selon un triptyque prévention, accès aux soins et financement. Pour renforcer la prévention des soins médicaux, il souhaite notamment obliger les 40 000 étudiants dans ces filières à réaliser un « service sanitaire » de trois mois axé sur la prévention.
Pour faciliter l’accès aux soins dans les « déserts médicaux » ainsi que désengorger les urgences aux hôpitaux, il veut développer la télémédecine, l’hospitalisation à domicile et doubler le nombre de « maisons pluridisciplinaires », qui seraient portées à 2 000, ainsi que créer des maisons de répit et de suite, notamment pour accompagner la dépendance. Afin de rendre les soins les plus coûteux mieux accessibles, il promet un remboursement à 100 % des soins auditifs, bucco-dentaires et d’ophtalmologie d’ici à la fin du quinquennat.
Pour en financer le remboursement, il mise sur une concertation avec les professionnels afin de « reparamétrer les coûts ». En contrepartie, les petits actes de prévention seraient revalorisés. Il compte surtout sur une « mise en concurrence des mutuelles », qui devront « réduire leurs marges », et sur une « mise en transparence des prix » des soins, dans l’espoir d’en diminuer le coût.
Plus largement, pour financer l’assurance-maladie, le candidat d’En Marche prévoit d’augmenter la CSG de 1,7 point, tout en supprimant les cotisations maladies des salariés.
Côté remboursements, plutôt que distinguer entre petits et grands soins, il laisse à la Haute Autorité de santé la charge de choisir entre les « soins utiles », à rembourser, et ceux « inutiles », à dérembourser, comme actuellement. Pour réaliser des économies, il propose de permettre la vente de médicaments à l’unité.
Les séjours hospitaliers concentrant les coûts, l’ancien ministre de l’économie a annoncé vouloir « plafonner à 50 % » la tarification à l’acte dans les hôpitaux et de « renforcer l’autonomie des hôpitaux », tout en prévoyant un plan d’investissement dans l’hôpital et l’innovation médicale de 5 milliards d’euros durant le quinquennat.
Benoît Hamon : démocratiser l’accès aux soins
Le candidat socialiste a fait de l’accès financier le plus large possible aux soins un axe de ses propositions en matière de santé. Il souhaite pour cela élargir l’ensemble des aides publiques à la complémentaire santé « aux fonctionnaires, retraités et étudiants qui n’en jouissent pas », quitte à envisager « une contribution supplémentaire (…) de la dépense publique ».
À l’égard des plus démunis, l’ancien ministre compte intégrer l’aide médicale d’État (AME, réservée aux immigrés en situation irrégulière) à la couverture maladie universelle et automatiser la CMU complémentaire « ou l’aide à la complémentaire santé pour les plus pauvres ».
Par ailleurs, Benoît Hamon a l’intention de s’attaquer aux prix jugés exorbitants de certains médicaments, allant jusqu’à recourir si besoin à la « licence d’office » pour produire des génériques, dès lors que les prix du marché de médicaments « ne correspondent pas à la réalité des coûts de production ».
Pour lutter contre les déserts médicaux qui commencent, dit-il, dès la banlieue parisienne, le député de Trappes (Yvelines) refuse les mesures coercitives. Il préfère décourager les médecins de s’installer dans des zones déjà surdotées en offre de soins en les déconventionnant.
Le candidat socialiste a aussi abordé longuement la question du burn-out. Pour lutter contre ce syndrome d’épuisement professionnel, l’ancien ministre propose d’inciter les entreprises à revoir leurs modes de management. Il veut aussi les faire cotiser davantage pour les accidents du travail, et de façon proportionnelle au nombre de cas de burn-out qu’elles compteront parmi leurs salariés.
Dénonçant la « surcharge de travail » à l’hôpital, lors d’une interview sur Europe 1 avant son oral devant la Mutualité française, Benoît Hamon veut sortir de la tarification aux actes car cela conduit, selon lui, à les multiplier « pour obtenir un bon financement de l’hôpital ». Il propose de la remplacer par « une notion de financement forfaitaire ». Plus largement, il a insisté sur le besoin de « repenser le fonctionnement de l’hôpital » public, sans détailler ici ses préconisations.
Côté prévention, il a rappelé ses ambitions écologiques pour améliorer les qualités de l’air et de l’eau, qui empêcheront que surviennent des maladies.
François Fillon revoit son programme, en gardant son objectif d’économies
François Fillon, très critiqué lors de la présentation de ses premières propositions, fin 2016, a entièrement revu son programme.
Tout en gardant l’objectif de faire réaliser 20 milliards d’économies en cinq ans à l’assurance-maladie, l’ancien premier ministre promet que le niveau de prise en charge ne diminuera pas. Pour ce faire, il souhaite lancer un « nouveau partenariat » entre l’assurance-maladie obligatoire et des organismes complémentaires. Ceci se nouerait à travers la création d’une « agence de garantie de la couverture solidaire des dépenses de santé ». Dans le partage des remboursements, le candidat n’exclut pas que les complémentaires santé soient davantage sollicitées.
Il promet ainsi un remboursement à 100 % des soins auditifs, des prothèses dentaires ou des lunettes. La prise en charge des lunettes pour enfants serait totale dès 2017, le reste le serait d’ici à la fin du quinquennat. Vis-à-vis des seniors, il propose des « aides à l’acquisition d’une complémentaire santé » pour les retraités « les plus modestes ». Il compte en revanche supprimer l’AME « pour mettre fin à la pression de l’immigration irrégulière » qui pèse, selon lui, sur le système de santé. Il confirme aussi vouloir supprimer la généralisation du tiers-payant. Il souhaite que le médecin-traitant reste « l’acteur central du parcours de soins ».
Pour faire des économies, François Fillon veut supprimer des postes administratifs à l’hôpital public, mais promet de n’en retirer aucun parmi le personnel soignant. Il a rappelé vouloir revoir l’organisation de l’hôpital à travers la hausse générale du temps de travail, ramené à 39 heures, qui sera négocié au niveau local. Le candidat Les Républicains veut aussi mieux gérer les soins par des « efforts d’efficience », limiter le « recours excessif à l’hôpital » et réintroduire un jour de carence pour y lutter contre l’absentéisme.
Côté prévention, qui représente une autre source d’économies, François Fillon propose « une consultation de prévention longue et gratuite tous les deux ans, pour tous les Français » ainsi qu’un grand plan santé à l’école. Interrogé sur le burn-out et les maladies professionnelles, il a surtout insisté sur les difficultés à chiffrer la pénibilité au travail.
Comme les autres candidats, le vainqueur de la primaire de la droite veut lutter contre les déserts médicaux, notamment en « (régionalisant) le numerus clausus des étudiants en médecine ».
Sébastien Maillard
http://www.la-croix.com/France/Politique/Ce-proposent-principaux-candidats-presidentielle-pour-sante-2017-02-21-1200826419