La "Résistance" s'organise face à Trump
AFP, publié le mercredi 15 mars 2017 à 13h59
Avant la victoire de Donald Trump, Kelsey Thomas partageait ses journées entre études, amis et plages de Floride. Désormais, elle organise des actions militantes et a rejoint la "Résistance", surnom de cette nouvelle ère activiste aux Etats-Unis.
Le déclic s'est fait avec la "Marche des femmes" le 21 janvier, au lendemain de l'investiture du nouveau président, lorsqu'elle a fait le voyage de Fort Lauderdale à Washington pour se joindre aux centaines de milliers de manifestants.
"Ca a été source d'inspiration et de motivation", explique à l'AFP cette étudiante de 29 ans, au sujet de sa toute première manifestation. "J'ai commencé à m'inquiéter après l'élection mais je me suis totalement engagée quand Trump a pris ses fonctions".
La jeune femme est responsable de l'antenne locale de la "Marche des femmes" et du mouvement contre la réforme du système de santé.
Comme elle, des milliers d'Américains estiment que leurs plus chères valeurs sont en danger et fourbissent leurs armes pour ce qu'ils considèrent être la lutte politique de leur vie.
José Parra, analyste politique de la société de conseils Próspero Latino, relève que "le grand public commence à s'éduquer politiquement quand il ressent une menace contre son mode de vie et c'est ce que l'on est en train de vivre avec les propositions de l'administration Trump".
Les droits des femmes, des immigrés, des musulmans sont dans la ligne de mire présidentielle, tout comme les gains de la communauté LGBT (Lesbiennes, Gays, Bi et Trans) et les avancées en matière de santé publique et d'environnement.
"Il y a controverse pour chacun" de ces sujets, souligne Anthony Romero, directeur de la puissante organisation de défense des libertés ACLU, porte-étendard de la lutte anti-Trump. "Beaucoup de domaines sont menacés".
Selon lui, l'organisation comptait 400.000 membres avant l'élection. Elle en a désormais 1,2 million.
- Capitaliser l'énergie -
"Nous vivons une période très fertile pour le militantisme parce que les gens sont menacés", dit Anthony Romero à l'AFP, lors d'une visite à Miami. "Mais, en même temps, ce n'est pas une période romantique. Les gens savent que le gouvernement fédéral aux mains de Donald Trump détient un pouvoir énorme".
Pour capitaliser sur cette énergie, l'ACLU a créé la plateforme PeoplePower.org dont le slogan est "Join the Resistance" --"Rejoignez la Résistance"--, pour recruter de nouveaux membres et les former aux bases de l'action politique.
Elle a été lancée samedi à Miami dans un amphithéâtre de 1.500 futurs militants, avec retransmission en direct sur Facebook. Ils ont assisté à des exposés sur la façon d'organiser une manifestation, sur la légalité des différentes actions, sur les meilleurs lieux de rassemblement ou encore sur les limites des prérogatives des forces de l'ordre.
Ce réveil politique est visible tous azimuts.
Lorsque le maire de Miami-Dade Carlos Gimenez a annoncé que sa ville cesserait d'être un sanctuaire pour immigrés, il a été confronté dès le lendemain à une manifestation devant la mairie. Et elles n'ont pas cessé depuis.
Les audiences des programmes de satire politique comme "The Tonight Show" et "The Late Show" ont bondi, les militants et ONG recrutent jusque dans les applications de rencontre comme Tinder --certains proposent sur leur profil de participer à de bien peu romantiques manifestations-- ou des sites comme Facebook.
L'organisation de défense des droits civiques MoveOn propose chaque dimanche des conférences téléphoniques "Ready to resist" --"Prêt à résister"-- pour guider les auditeurs dans les méandres de la résistance populaire.
Wilfredo Ruiz, porte-parole de l'antenne de Floride du Conseil des relations américano-islamiques (CAIR), estime que les mesures de Donald Trump contre l'entrée de musulmans aux Etats-Unis ont stimulé les mouvements civiques.
- Réseau secret -
Tout cela a entraîné une résistance nationale, souligne-t-il. "Nous nous coordonnons avec d'autres organisations de protection des droits civiques à un niveau sans précédent", relève M. Ruiz.
Selon lui, ONG, universités, églises, mosquées ou encore synagogues ne se contentent plus de manifester ensemble ou de soutenir des causes communes, ils partagent désormais stratégies, ressources et outils logistiques.
C'est notamment le cas en Californie où des responsables religieux ont créé un réseau secret de foyers pour immigrés clandestins.
D'aucuns comparent cette effervescence idéologique au climat des grandes manifestations pour les droits civiques des années 1960.
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